Interview de Ségolène Charles, coordinatrice du Conseil de développement de la Métropole de Nantes

Interview de Ségolène Charles, coordinatrice du Conseil de développement de la Métropole de Nantes

Diplômée de l’ENSASE en 2013, Ségolène Charles a construit un parcours mêlant architecture, urbanisme et sciences politiques. Après une thèse sur la participation citoyenne dans les projets urbains, elle coordonne aujourd’hui le Conseil de développement de la Métropole de Nantes, une instance citoyenne au rôle consultatif. Dans cette interview, elle revient sur son parcours, ses engagements et livre de précieux conseils aux étudiants qui souhaitent explorer les enjeux démocratiques dans la construction urbaine.

Pouvez-vous vous présenter, me parler de votre parcours académique et de votre évolution professionnelle ?

Je m'appelle Ségolène Charles. J’ai été diplômée de l'École nationale supérieure d'architecture de Saint-Étienne (ENSASE) en 2013. Mon diplôme de fin d’études portait sur la mobilité transfrontalière à Bâle, et ma mention recherche sur la participation citoyenne dans les questions de mobilité durable. C’est comme ça que je suis tombée dans la marmite de la participation citoyenne, un peu par hasard, mais ça m’a passionnée.

J’ai ensuite poursuivi mes études à l’Institut d’Urbanisme de Paris, où j’ai approfondi cette thématique à travers un mémoire de diplôme sur un projet d’aménagement participatif à Nantes. J’étais en stage dans un cabinet spécialisé en programmation urbaine, ce qui m’a permis de prolonger mon intérêt pour la participation.

Cette articulation entre pratique et recherche m’a vraiment plu, au point que j’ai entamé une thèse. Elle portait sur le projet urbain participatif dans les petites villes, et plus précisément sur les relations entre élus, citoyens et architectes. J’ai réalisé cette thèse en co-direction entre l’École d’architecture de Paris-La Villette et le Centre Européen de Sciences Politiques. En parallèle, j’étais en poste dans une agence d’urbanisme et d’architecture à Nantes, où je suis restée six ans.

Ma thèse a donné lieu à un livre, L’élu, le citoyen et l’architecte. Aujourd’hui, je suis coordinatrice du Conseil de développement de la Métropole de Nantes, une instance citoyenne qui travaille en lien avec les élus et les services pour apporter des idées et impulser des projets

Qu’est-ce qu’une journée type dans votre métier actuel ?

C’est un métier à la croisée de tout ce que j’ai fait jusque-là. Je suis en contact avec les citoyens membres de l’instance pour faire avancer les projets, comme en ce moment un événement sur la santé mentale des jeunes. Je travaille aussi en lien avec les chercheurs, les praticiens, les élus et les services. C’est un travail de coordination et de conduite de projet, avec une forte dimension partenariale.

Quelles sont les qualités requises pour exercer ce métier ?

C’est un poste très spécifique qui mobilise différentes compétences issues de mes expériences en architecture, urbanisme et recherche. Il faut une vraie capacité à conduire des projets, à problématiser et à avoir une posture réflexive. Il faut aussi savoir faciliter les échanges entre des acteurs variés. C’est une combinaison entre la rigueur académique, l’agilité professionnelle et une forte capacité relationnelle.

Avez-vous rencontré des challenges dans votre carrière ?

Oui, notamment lors de ma thèse. Je me souviens d’un projet dans une petite commune où on intervenait comme assistant à maîtrise d’ouvrage pour un projet urbain participatif. On n’arrivait pas à comprendre les décalages entre les intentions et les actions. En revenant dessus avec une approche de recherche, je me suis rendue compte de ce qui coinçait, c’était la dimension socio-politique du projet. En tant qu'architecte, on n’avait pas saisi toute la complexité des jeux d’acteurs. Cela m’a amenée à élargir ma vision du projet urbain, en intégrant les questions de gouvernance, de pouvoir décisionnel, et de lecture des dynamiques politiques. Ce sont des compétences peu enseignées en école d’architecture, mais qui sont pourtant fondamentales.

Pourquoi avez-vous choisi de faire votre formation à l’ENSASE ?

À l’époque, les concours d’entrée en école d’architecture étaient nombreux et sélectifs, et c’est à l’ENSASE que j’ai eu l’opportunité d’intégrer une formation. Ce qui m’a tout de suite marquée c’est leur rapport au contexte. On abordait déjà la question de l’urbanisme et de l’architecture contextuelle. Cela m’a permis de développer une posture très urbaniste : comprendre les lieux, les habitants, les enjeux politiques. Une approche que j’ai poursuivie tout au long de mon parcours.

Qu’est-ce que l’ENSASE vous a apporté ?

Elle m’a donné un vrai positionnement. Même si les études d’architecture ne mènent pas toutes au métier d’architecte maître d’œuvre, elles développent une culture du projet, du rendu, du discours, de la présentation. Ce sont des compétences que j’utilise encore aujourd’hui. Mon parcours à l’ENSASE m’a permis d’aborder l’urbanisme et la sociologie, de m’ouvrir à d’autres disciplines et de construire une posture professionnelle singulière.

Quels sont vos projets pour l’avenir ?

Je suis bien là où je suis. Je travaille dans le champ public, ce qui est cohérent avec mes engagements passés. Je continue à enseigner ponctuellement. Et je souhaite surtout continuer à défendre l’idée que participation citoyenne, urbanisme et transition environnementale doivent marcher main dans la main. Ce sont des valeurs qui guident ma pratique.

Quel conseil donneriez-vous à un étudiant qui aimerait suivre votre voie ?

Je dirais de ne pas sous-estimer les compétences que demande la participation citoyenne. Ce n’est pas juste faire des ateliers avec des post-its. Il faut comprendre les enjeux de gouvernance, savoir articuler un projet collectif. Je leur conseille de participer eux-mêmes à des démarches participatives, de se former, voire de suivre un master dédié. Et surtout, de croire que les architectes ont toute leur place dans ces processus. C’est une vraie compétence à développer.


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