Interview alumni : Chrispin Pettang, enseignant-chercheur

Aujourd'hui, nous partons à la rencontre de Chrispin Pettang, alumni 1987 de l’ENSASE et enseignant chercheur au cycle d’Ingénieur et Doctoral, mais aussi directeur des Infrastructures de la Planification et du Développement à l’Université de Dschang (Cameroun). Monsieur Pettang revient sur son parcours d’ingénieur - architecte et nous partage son point de vue sur la profession d’enseignant.
Pouvez-vous vous présenter et parler de vos années d’études ?
Je suis Chrispin PETTANG, Ingénieur Polytechnicien (ENSPY, 1981), Architecte DPLG (ENSASE), Docteur en Sciences de l’Ingénieur (Ecole Polytechnique de Yaoundé, 1993) et HDR en Sciences (INSA-Université Claude Bernard de Lyon I, 2001). Après avoir eu mon diplôme d’Ingénieur, j’ai intégré l’UPA St Etienne en 1982 où j’ai été diplômé en 1987.
Durant mon cursus, j’ai travaillé avec André ACCETTA, Patrick BERGER, Dominique VIGIER, M. MAZODIER, Yves PERRET, Jean Noël BLANC, Henry LAYE, Christian EYCHENE, Mario BONILLA, VERAN, Daniel VALLAT à qui je rends un vibrant hommage. J’ai été aussi Moniteur au Laboratoire de construction de l’Ecole d’Architecture de par ma formation initiale d’Ingénieur. Nous avons aussi engagé des projets dans la construction en terre dans le cadre du groupe Architerre avec l’INSA de Lyon dès les années 1984. Mes années d’études d’Architecture à St Etienne m’ont construit l’ambivalence d’Architecte Ingénieur que je suis devenu. Je me réjouis d’avoir eu à travailler avec des enseignants d’orientations diverses mais de bonne qualité.
Qu’avez-vous fait les années qui ont suivi votre diplomation à l’ENSASE ?
Je suis rentré au Cameroun dès décembre 1987. J’avais déjà un projet dans la poche, la construction de l’abri de fabrication des Briques de Terre Stabilisées (BTS) en compactage dynamique, technique à partir de laquelle nous avons sous la direction de A. ACCETTA publié plusieurs articles scientifiques dans les annales du CSTB. Plusieurs autres projets à l’Université en en matériaux locaux notamment quelques maisons d’habitation et des infrastructures d’enseignement m’ont permis d’envisager le début de ma carrière. Nous fabriquions les BTS que nous utilisions nous-mêmes dans la réalisation des projets que nous avions conçus.
Parallèlement, nous avons intégré l’équipe pédagogique de l’Ecole Nationale Supérieure Polytechnique de Yaoundé « Maitrise d’ouvrage Urbaine » destinée aux étudiants de 5e année de génie civil et aux professionnels du Ministère de l’Urbanisme pour l’étude des Villes Moyennes du Cameroun de 50 à 100 000 habitants (c’était de l’urbanisme dans toutes ses facettes).
Il y avait aussi les infrastructures Universitaires presque abandonnées à elles-mêmes (pour une université de 30 000 étudiants) dont on m’a confié la charge. Sans oublier mon recrutement à la Direction de l’Architecture et de l’Habitat au Ministère de l’Urbanisme et de l’Habitat, j’étais comme vous pouvez le constater très occupé.
Que de sollicitations mais paradoxalement sans des revenus à la hauteur de ces dernières : mon Pays est en développement, il m’a payé les études en tant que fils de cultivateur que je suis et il n’était pas question que je me dérobe à ces charges. Disons quand même que les projets privés me rapportaient.
Pourquoi avoir choisi la voie de l’enseignement ?
La voie de l’enseignement au vu de ce qui vient d’être dit n’est donc pas tellement un concours de circonstances. À mon retour au Cameroun en décembre 1987, tout en attendant mon recrutement au Ministère de l’Urbanisme et de l’Habitat, j’assurais la maitrise d’œuvre du projet de construction de l’abri de fabrication des BTS à l’Ecole Nationale Supérieure Polytechnique de Yaoundé, projet conçu par Yves PERRET et André ACCETTA. Le Directeur d’alors de l’Ecole Henri BOTTA en me faisant intégrer l’Equipe d’encadrement de la Maitrise d’ouvrage urbaine, m’a associé aux différents enseignements du département de Génie Civil.
Compte tenu du manque d’enseignants, il était difficile de me dérober d’autant que c’est dans cette école que j’ai eu mon diplôme d’Ingénieur. Mais l’Enseignement ne m’a pas éloigné de la pratique de l’architecture au contraire, elle m’a d’autant servi que la plupart des cours que je dispensais n’était pas bien loin du sujet.
Concrètement, quel est votre quotidien ?
Actuellement j’ai gravi beaucoup d’échelons et mon quotidien est très laborieux. Non seulement j’assume les tâches d’enseignant chercheur au cycle d’Ingénieur et Doctoral, mais je suis le Directeur des Infrastructures de la Planification et du Développement à l’Université de Dschang à 400km de l’Ecole Nationale Supérieure Polytechnique de Yaoundé. Ma semaine est donc partagée entre 3 jours pleins d’enseignement et 2 jours d’Administration.
Parallèlement je fais toujours des projets en tant qu’Architecte quand j’en ai l’occasion puisque ce métier me passionne. Ce d’autant que la plupart de mes enseignements au cycle d’Ingénieur tournent autour de l’Architecture de la construction, de la Technologie du Bâtiment, de l’Habitat, du Dessin de Génie Civil. Même dans mes fonctions administratives, j’assume les fonctions d’assistance à la Maitrise d’ouvrage, parfois de Maitre d’œuvre pour le compte des Universités et aussi d’Architecte.
Selon vous, qu’est-ce qu’un bon professeur ?
En ingénierie comme en architecture, un bon professeur est d’abord un bon professionnel qui pratique et possède des références mais aussi un bon pédagogue. La technologie évolue en même temps que les prises de conscience relatives aux changements dont nous sommes de plus en plus victimes et soumis. Le bon professeur doit s’informer et assumer ces changements. Le développement durable engendre la prise en compte de nouveaux concepts notamment en ce qui concerne l’architecture, la construction et les Sciences de l’Habitat.
Des normes HQE ont fait leur apparition depuis plus d’une dizaine d’années et être professeur aujourd’hui exige la prise en compte de tous ces changements afin de les intégrer dans les nouvelles offres de savoir liées à la construction et à l’architecture. Les nouvelles hypothèses d’approche des technologies de la construction doivent être maîtrisées. Le numérique et le digital ayant aujourd’hui pris le dessus, le professeur doit être permanemment aux normes des TIC.
Si l’architecture résiste au temps, l’architecte doit de manière permanente intégrer et assumer les technologies qui la mettent en œuvre. Telle est la beauté de l’acte de bâtir.
Faut-il avoir de l’expérience professionnelle pour enseigner ?
L’enseignement des préliminaires ne nécessite pas d’expérience professionnelle préalable.
Mais enseigner avec une expérience professionnelle est un grand atout. Dans certains types de formation comme l’architecture et l’ingénierie, le savoir ne se transmet véritablement qu’à travers le partage permanent d’expériences rencontrées. Ce qui veut dire qu’il faut pratiquer pour mieux enseigner. Ceci est valable et fortement recommandé pour les enseignements qui conduisent plus aux métiers qu’aux diplômes (architecture, ingénierie, médecine, etc...).
Disons que l’expérience professionnelle avérée est le socle d’un bon enseignement et la qualité des étudiants obtenus n’est que le fruit d’une telle symbiose.
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